cours:residanat:pneumologie:pleuresies_purulentes_non_tuberculeuses
Table des matières
Pleurésies purulentes non tuberculeuses
1. Définition
- Présence d'un liquide dans la grande cavité pleurale :
- Franchement purulent (épais, crémeux, souvent nauséabonde)
- Louche et trouble
- Ou clair avec à prédominance PNN
- Dues à des germes banals
2. Épidémiologie
- Peu fréquentes, mais le pronostic est sévère
- Compliquent 40% des pneumonies
- Diminution de la fréquence des empyèmes à pneumocoque, émergence d'autres souches moins sensibles et/ou plus virulentes (BGN, anaérobies)
- Prédominance masculine, tout âge avec 2 pics (0-9 ans et 40-60 ans)
- Facteurs favorisants dans 2/3 des cas :
- Diabète, insuffisance rénale
- Tabac, alcool, toxicomanie
- Maladies respiratoires chroniques
- Mauvaise état buccodentaire
- RGO, fausses routes
- Néoplasie
- Immunodépression
- Dénutrition
- Causes :
- Parapneumoniques (66%)
- Post-op (13%)
- Post-traumatiques (5%)
- Iatrogènes (4%)
- Divers : perforation œsophagienne, abcès sous phrénique, corps étranger, DDB, mucoviscidose (12%)
3. Étiopathogénie
3.1. PPNT d'origine pulmonaire
- Les plus fréquentes
- Souvent, complique une pneumonie ou pneumopathie, plus rarement :
- Rupture d'abcès pulmonaire
- Embolie pulmonaire septique
- Cancer, DDB, bulles ou malformation sur-infectés
- Infarctus pulmonaire sur-infecté
- Obstruction bronchique par un corps étranger
3.2. PPNT d'origine extra-pulmonaire
- Plus rares
- Médiastinales : perforation de l’œsophage, médiastinite (dentaire ou ORL)
- Rachidienne
- Sous-diaphragmatique : abcès sous diaphragmatique, péritonite, cancer ou diverticule, infarcissement splénique, abcès hépatique, perforation d'organe creux
- Rétro-péritonéale : pyélonéphrite…
- Systémique : bactériémie ou septicémie
3.3. PPNT dites idiopathiques
- Une PP ne peut pas être idiopathique : la pneumonie causale peut avoir disparu au moment du diagnostic
- Les autres causes sont à rechercher systématiquement : risque de non guérison ou de récidive sans traitement de la cause
3.4. PPNT iatrogènes
- Fréquence juste après les PP d'origine pulmonaires
- En générale : surinfection d'un épanchement préexistant (hémothorax, hémoPNO, PNO, pleurésies diverses, chylothorax)
- Complications de chirurgies thoraciques = 20% des PP iatrogènes
- Surtout : exérèse pulmonaire, perforations instrumentales, chirurgie de l’œsophage ; plus rare : chirurgie cardiaque, vasculaire et abdominale
4. Physiopathologie
Phase | Épanchement | Plèvres | Guérison |
---|---|---|---|
Diffusion initiale | - fluide - plus ou moins louche - inflammatoire, exsudatif - riche en PNN | - congestives, rougeâtres, surfaces dépolies - fines et souples - dépôts fibrineux pas importants et faciles à décoller | - anatomique et sans séquelles (sous traitement) |
Collection | - visqueux - franchement purulent | - épaissis - rigides (pachypleurite la plus épaisse en pariétal) - dépôts fibro-leucocytaires et nécrotiques - symphyse pleurale commence en haut et en avant | - peut être totale, mais souvent séquelles (brides, symphyses locales/globales pouvant se calcifier) |
Enkystement | - enkysté par la symphyse pleurale | - pachypleurite (plaque scléreuse enveloppant le poumon ⇐ fibroblastes/collagène) - fixe à la plèvre viscérale (inclivable), efface toute trace du feuillet pariétal - peut se calcifier avec le temps | - lésions irréversibles (décortication chirurgicale peut être nécessaire) |
5. Diagnostic positif
5.1. Clinique
- Variable, dépend de plusieurs facteurs (âge, germe, lésions pleuro-pulmonaire préalable TBK ou non, prise de CTC ou Abio à l'aveugle)
- Début :
- Plus souvent brutal, marqué par un syndrome infectieux (fièvre 40°C + frissons, douleurs thoraciques, toux peu productive, dyspnée)
- Formes à 2 temps fréquentes : pneumonie, amélioration puis reprise des symptômes
- Formes sub-aiguës et chroniques : surtout sujet âgé et CTC au long cours (fièvre légère, asthénie, signes locaux modestes)
- Rarement : découverte au stade de fistulisation bronchique voir externe
- État :
- Fièvre : quasi constante
- Toux : sèche, surtout aux mouvements et changement de position
- Dyspnée : selon le volume de l'épanchement
- Douleur thoracique : latéralisée, irradiant au dos ou à l'épaule, augmente à la mobilisation (toux, mouvement)
- Autres (inconstants) : ARG, frissons, hémoptysie
- Examen : signes physiques variables
- Hémithorax immobile
- Syndrome d'épanchement pleural liquidien (triade de trousseau : matité, diminution des VV et du MV)
- Recherche d'un foyer infectieux (ORL, dentaire+++)
- Aucun signe pour affirmer le caractère purulent (sauf la ponction)
5.2. Para-clinique
- Radiographie thoracique : face + profil +++
- Phase de diffusion : diagnostic difficile, liquide visible que sur le profil (cul de sac postérieur)
- Phase de collection : pleurésie, mal limitée (limites floues)
- Phase d'enkystement : épanchement enkysté
- Niveau hydro-aériques avant l'épanchement ⇒ évoquer germes anaérobies et fistule broncho-pleurale
- Ponction pleurale : (voir cours fiche technique)
- Aiguille épaisse (pus)
- Peut être blanche (adhérences) ⇒ changer de site de ponction
- Macroscopie : liquide trouble/louche/franchement purulent, parfois malodorant (anaérobies)
- Cytologie : PNN altérés = pus
- Bactériologie : antibiogramme +++
- Biochimie : intérêt moindre (exsudat hypoglycopleurie)
- Bactériologie :
- Peut être polymicrobien (apanage des fistules broncho-pleurales, infections à anaérobies, fistules d'origine digestive)
- Peut être stérile : décapitée, mauvaise technique et faux négatif, épanchement puriforme aseptique
- Types de germes :
- Pneumocoque : fréquence moindre depuis l'ère des antibiotiques
- BGN : fréquence en augmentation avec l'augmentation des infections nosocomiales (klebsiella, enterobacter, pseudomonas, proteus, E. coli)
- Staphylocoque : 15 à 40% des cas
- Anaérobies : fréquence variable d'une étude à une autre
- Autres :
- Hémocultures
- ECBC
- Antigènes solubles (hémophilus B)
- Fibroaspiration et prélèvement protégé
- Bilan standard, inflammatoire, recherche de complications…
6. Diagnostic étiologique
- Foyer infectieux :
- Bucco-dentaire : examen + panoramique
- ORL + radiographie des sinus
- Foyer abdomino-pelvien
- Terrain : rechercher
- Diabète
- Atteinte cardiaque ou rénale
- Néoplasie sous-jacente
- Hépatopathie éthylique
- Bilan pleuro-pulmonaire :
- Radiographie + TDM +++
- Fibroscopie systématique
- Test au bleu de méthylène (recherche de fistule broncho-pleurale)
7. Évolution et pronostic
- Favorable :
- À condition d'un traitement précoce et bien conduit
- Surveillance prolongée +++ : kinésithérapie, contrôle radiologique, bilan fonctionnel et étiologique à distance
- Défavorable :
- Enkystement et séquelles (pleurales, pariétales et parenchymateuses) ⇒ kinésithérapie +++
- Chronicité (rare) : sujet âgé, terrain débilité
- Empyème de nécessite (extériorisation du pus) : devenu exceptionnel
- Fistule pleuro-bronchique : vomique purulente
- Facteurs de mauvais pronostic :
- Locaux :
- Atteintes et anomalies pleurales, pariétales ou broncho-pulmonaires pré-existantes
- Généraux :
- Âge avancé
- Néoplasie
- Tares : diabète, BPCO, alcoolisme, insuffisance cardiaque ou rénale, neurologique
- Germe : hospitaliers, BGN, staph
8. Formes cliniques (selon les germes)
- Pneumocoque :
- Complique la quasi totalité des pneumonies à pneumocoque (non traitées)
- Reste sensible aux Abio
- Tendance au cloisonnement (pus riche en fibrine)
- Streptocoque :
- Complique les pneumonies à pneumocoques, otites et autres affections ORL
- Tableau bruyant, EPL abondant
- Sensible aux Abio
- Staphylocoque :
- Surtout chez l'enfant
- Rechercher des facteurs favorisant : immunodépression, CTC, diabète, toxicomanie (héroïnomanie avec endocardite du coeur droit)
- BGN :
- Fréquence croissante (infections nosocomiales +++)
- Surtout chez les sujets débilités
- Anaérobies :
- Germes endogènes, qui deviennent pathogène à l'occasion de différents facteurs (suppuration pulmonaire lors d'un néo bronchique, corps étranger, DDB, infarctus pulmonaire, inhalation, infection ORL ou dentaire, dissémination hématogène à distance (gynéco, digestif…))
- Pus et expectoration fétide
- Pneumopathie nécrosante, et image pleurale hydroaérique (avant toute ponction = non iatrogène)
9. Traitement
- En plus du traitement de la cause (médical vois chirurgical), il faut :
- Stériliser le foyer infectieux
- Évacuer l'épanchement
- Traiter les perturbations biologiques et hydroélectrolytiques
9.1. Antibiothérapie
- Traitement urgent, juste après les prélèvements bactériologiques
- Association bactéricide, parentéral, d'abord orienté par le tableau puis éventuellement réajuster
- Il faut :
- Couvrir pneumocoque, CGP, anaérobies
- Diffusion pleurale
- Actif en milieux acide
- ⇒ Pénicilline, céphalosporine, métronidazol, clindamycine, fluoro-quinolones, amoxicilline + acide clavulanique
- Durée : 4 à 6 semaines
9.2. Traitement local
- Ponctions : quotidiennes, +/- lavage avec SSI et antiseptique
- Drainage : aspetie rigoureuse, doit être associé au lavage, retirer quand l'aspiration n'est plus productive
- Décortication : permet de supprimer le foyer de suppuration s'il persiste et de libérer le poumon de la pachypleurite ; seulement si état général conservé et fonction respiratoire correcte
- Fibrinolyse : fluidifie le pus épais riche en fibrine, injecter dans le drain avec 30-50 cc de SSI, laisser 2 à 4h
- Streptokinase 250.000 UI, Urokinase 100.000 UI, rT-PA 10 à 25 mg
- Contre-indications : allergie au produit, fistule broncho-pleurale
- Kinésithérapie : systématique, limite les séquelles et donc le recours à la chirurgie, pendant 3 à 6 mois
9.3. Traitement de l'état général
- Ces perturbations (et leur prise en charge) conditionnent largement la mortalité
- Nutrition
- Hydratation et troubles électrolytiques
- Diabète
- Hypoxie
- Choc…
— Résumé basé sur le cours (diapos) de Pr. S. Alihalassa (2014)
cours/residanat/pneumologie/pleuresies_purulentes_non_tuberculeuses.txt · Dernière modification : 2019/04/16 13:35 de admin@medwiki-dz.com