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cours:residanat:pneumologie:pleuresies_a_liquide_clair

Pleurésies à liquide claire (non purulente)

1. Physiologie et physiopathologie

  • Espace pleural = cavité virtuelle à pression négative ⇒ maintient le poumon en expansion
  • Liquide pleural : constamment sécrété et résorbé (5-20 cc/j) ⇒ permet le glissement
  • Déséquilibre sécrétion/réabsorption ⇒ pleurésie (une pleurésie est toujours pathologique)
  • Mécanismes :
    • Transsudat = anomalie mécanique :
      • Déséquilibre entre pressions hydrostatiques (insuffisance cardiaque, hypertension portale) et oncotique (hypoalbuminémie par syndrome néphrotique, insuffisance hépato-cellulaire ou dénutrition sévère)
      • Augmentation de la dépression pleurale (atélectasie)
      • Passage de liquide d'ascite vers la cavité pleurale (puits de Ranvier)
    • Exsudat = agression inflammatoire, infectieuse ou néoplasique

2. Diagnostic positif

2.1. Circonstances de découverte

  • Douleur thoracique, exacerbée à la respiration, la toux et parfois la pression pariétale
  • Dyspnée
  • Toux sèche, au changement de position
  • Hyperthermie (pneumonie sous-jacente)
  • Radiographie (découverte fortuite)

Tous ces signes cliniques peuvent manquer (pleurésie minime < 500 cc)

2.2. Affirmer le diagnostic

  1. Radiographie thoracique :
    • Opacité dense, homogène, non systématisée, effaçant les contours des éléments de voisinage, non rétractile, limitée par une ligne bordante concave en haut et en dedans = épanchement libre
    • Autres aspects :
      • Poumon blanc refoulant (≠ atélectasie totale ⇒ signes de refoulement/signes de rétraction)
      • Épanchement partiellement cloisonné (visible derrière la coupole au cliché de profil)
      • Épanchement sous pulmonaire (augmentation de la distance poumon-poche à air gastrique (≥ 15 mm), surélévation de la coupole droite)
      • Épanchement cloisonné (image médiastinale, arrondie, épanchement scissural, épanchement arrondi postérieur suspendu)
  2. Échographie thoracique :
    • Image anéchogène
    • Utile pour les épanchements cloisonnés, différentier d'un collapsus, repérage et guidage des ponctions difficiles
  3. TDM thoracique :
    • Pas indispensable en urgence sauf suspicion d'hémothorax ou d'embolie pulmonaire
    • Permet de rechercher des signes d'orientation étiologique (plaques pleurales, nodules ou masses, lymphangite carcinomateuse…)

2.3. Ponction pleurale

  • Tous épanchement doit être ponctionner, sauf :
    • Faible abondance (risque > bénéfice)
    • Insuffisance cardiaque gauche : pas en première intention, sauf si : unilatéral/asymétrique, douleurs pleurale ou fièvre, non réponse au traitement de l'insuffisance cardiaque
  • La ponction doit se faire en urgence si :
    • Épanchement fébrile (visée étiologique et parfois évacuation si épanchement para-pneumonique)
    • Suspicion d'hémothorax
    • Mauvaise tolérance clinique
  • Ne pas évacuer tout le liquide d'emblée car :
    • Laisser du liquide facilite la pose secondaire d'un drain thoracique ou la réalisation d'une thoracoscopie
    • Même si l'épanchement est mal toléré, en général évacuer 1 ou 2L suffit à soulager le patient
  • Évacuer tout le liquide si :
    • Intérêt pour l'enquête étiologique (vider avant une TDM pour mieux étudier le parenchyme)
    • Épanchement para-pneumonique non cloisonné

2.3.1. Étude du liquide pleural

  1. Macroscopie :
    • Tout épanchement qui n'est pas franchement citrin et clair est à priori exsudatif
    • Purulent (fétide dans les empyèmes à anaérobies)
    • Hémorragique : pas toujours synonyme d'hémothorax ; context post-traumatique ⇒ hématocrite pleurale ; si non, premier diagnostic = néoplasique
    • Lactescent : oriente vers un chylothorax
  2. Examens biologiques de première intention :
    • Biochimie : protide et LDH
      • Protides < 25 g/l ⇒ transsudat ; > 35 g/l ⇒ exsudat
      • Entre 25 et 35 g/l : critères complémentaires (de Light)
        • LDH > 200 UI/L OU protides pleuraux/sériques > 0,5 OU LDH pleuraux/sériques > 0,6 ⇒ exsudat
    • Cytologie :
      • Leucocytes : en général < 1000/µl dans les transsudats, > 1000/µl dans les exsudats
      • Lymphocytaire : TBK, néoplasique, lymphome, chylothorax, rhumatoïde…
      • PNN : infections (para-pneumonique, réaction à des foyers infectieux sous-phréniques…), EP aiguë, pancréatite aiguë
      • PNE : PNO, hémorragique, médicamenteuse, parasitaire, asbestosique bénigne, cancer…
      • Cellules tumorales :
        • Permettent d'affirmer la nature néoplasique
        • Suffisantes si cancer connu, histologie indispensable si non
        • Immunohistochimie possible (orientation)
    • Bactériologie :
      • Recherche de germes pyogènes habituels (examen direct, culture aérobie et anaérobie)
      • Recherche de mycobactéries (examen direct et culture)
  3. Examens biologiques de deuxième intention :
    • pH pleural : < 7,20 ⇒ justifie un drainage pour certains auteurs (discuté), en cas d'EPL fébrile pas typiquement purulent, bactériologie négative
    • Hématocrite : pleurale/sanguine > 0,5 ⇒ hémothorax vrai
    • Amylase : élevée en cas de pathologie pancréatique et sous-phrénique
    • Glucose :
      • Pleurésie rhumatoïde : taux normal (> 0,5 glycémie) ⇒ peu probable
      • Présence de bactéries : abaissé
    • Triglycérides :
      • Liquide lactescent et Tg > 1,1 g/L (1,2 mmol/L) ⇒ confirme le chylothorax

3. Diagnostic étiologique

Principales étiologies des épanchements pleuraux :

Transsudats Exsudats
Cellules tumorales Neutrophiles Lymphocytes Éosinophiles
- Plutôt bilatéral :
Insuffisance cardiaque
Dialyse péritonéale
Syndrome néphrotique
Pleurésie métastatique
Mésothéliome
Hémopathies malignes
Épanchement para-pneumonique
Embolie pulmonaire
Pancréatite
Foyer sous-phrénique
Atteinte œsophagienne
Tuberculose
Cancer
Lymphome
Sarcoïdose
Chylothorax
Connectivites (PR, LED)
Hémothorax
Pneumothorax
Embolie pulmonaire
Pleurésie asbestosique bénigne
Parasitose
Pleurésie médicamenteuse
Cancer
- Plutôt unilatéral :
Cirrhose
Atélectasie
Embolie pulmonaire

3.1. Orientation clinique

3.1.1. Situations typiques

  • Épanchement associé à une pneumonie ⇒ ponction immédiate
    • Distinguer un EPL para-pneumonique “compliqué” d'un “non compliqué”
  • Épanchement dans un contexte traumatique ⇒ ponction immédiate
    • Poser le diagnostic d'hémothorax
  • Épanchement chez un cancéreux connu ⇒ recherche de cellules tumorales

3.1.2. Situations moins typiques

  • Embolie pulmonaire : toujours évoquer cette hypothèse surtout avec un tableau compatible

3.2. Pas d'orientation clinique

3.2.1. Transsudat

  • Évaluer les fonctions cardiaque, hépatique et rénale

3.2.2. Exsudat

  • Toujours éliminer en premier lieu un cancer ⇒ histologie indispensable
  • Biopsie pleurale à l'aveugle :
    • En première intention seulement si suspicion de TBK pleurale (lésions diffuses)
    • Nombreux faux négatifs dans les EPL néoplasiques (atteinte souvent discontinue)
  • Thoracoscopie :
    • Rendement diagnostic dans le néoplasique ≥ 85%
    • Quelques faux négatifs liés aux adhérences empêchant l'exploration complète de la cavité pleurale
  • Enquête négative ⇒ surveillance prolongée (néoplasie +++)

3.3. Causes des principaux épanchements pleuraux

3.3.1. Transsudat

  1. Insuffisance cardiaque gauche : tableau clinique et radiologique le plus souvent évocateur (ICG, signes de surcharge)
  2. Cirrhose :
    • EPL typiquement : indolore, bien toléré (sauf si abondant), unilatéral ou prédominant à droite
    • Si douloureux, fébrile ou bilatéral (en l'absence de syndrome œdémato-ascitique) ⇒ pousser les explorations
  3. Syndrome néphrotique : bilatéral et symétrique
  4. Atélectasie : majoration de la pression négative intra-pleurale, rarement abondant
  5. Embolie pulmonaire : peut donner des EPL transsudatifs

3.3.2. Exsudats

3.3.2.1. Néoplasique

  • Selon la fréquence : poumon, sein, œsophage, colon…
  • Primitif méconnu dans 10% des cas
  • EPL abondant et récidivant, séro-hématique, rosé ou citrin
  • TDM après évacuation du liquide : masse, épaississement pleural irrégulier, bougeons pleuraux, lâcher de ballons, lymphangite, adénomégalies…
  • Cellules tumorales retrouvée dans moins de 30% des cas :
    • N'affirme la nature néoplasique que si cancer connu ou découvert au cours de l'exploration
    • Si non, il faut une confirmation histologique
  • Biopsie à l'aveugle (rendement < 50%) ; thoracoscopie : rendement excellent

Mésothéliome :

  • Arguments en faveur :
    • Exposition à l'amiante, même faible ; non retrouvée dans 20 à 40% des cas
  • Asymptomatique au début, puis souvent douloureux (stade avancé)
  • Imagerie :
    • Festonnement pleural, épaississement diffus ; évocateur surtout si circonférentiel (atteinte de la plèvre médiastinale et du péricarde)
    • Rétraction de l'hémithorax
    • Signes d'exposition à l'amiante parfois associés (plaques pleurales calcifiées)
  • Liquide citrin ou séro-hématique, formule aspécifique
  • Biopsies indispensable pour affirmer le diagnostic (thoracoscopie +++)

3.3.2.2. Infectieux

  1. Pneumonies bactériennes : ponctionner pour distinguer :
    • EPL para-pneumonique “non compliqué” :
      • Liquide clair, peu abondant, stérile (examen direct et culture), pH > 7,2
      • ⇒ Simple antibiothérapie (évacuation optionnelle)
    • EPL para-pneumonique “compliqué” (pleurésie purulente) :
      • Liquide trouble ou purulent ou abondant ou cloisonné ou présence de germe (examen direct ou culture) ou pH < 7,2 (discuté) ou LDH > 1000 ou glycopleurie < 2,2 mmol/L
      • ⇒ Antibiothérapie + évacuation du liquide (ponctions itératives si pas de cloisons, drainage, thoracoscopie de débridement, pas de consensus sur la place du lavage ou de la fibrinolyse pleurale)
  2. Pneumonies virales : épanchement peu abondant, lymphocytaire ou mixte, non spécifique ; avec parfois péricardite (pleuro-péricardite virale)
  3. Pleurésie tuberculeuse :
    • Pleurésie séro-fibrineuse (à distinguer du pyopneumothorax tuberculeux = rupture d'une caverne dans la plèvre ⇒ caséum riche en BK), qui peut survenir au décours immédiat (6 à 12 semaines) d'une primo-infection, ou à distance (réactivation d'un foyer ancien)
    • Cliniquement aspécifique : début progressif, fièvre modérée, amaigrissement, IDR positive (négative chez 30% des immunocompétents ⇒ n'exclue pas le diagnostic)
    • Peu ou pas de lésions parenchymateuses
    • BK de l'expectoration exceptionnellement positive
    • Liquide exsudatif riche en protéines, lymphocytaire (parfois mixte au tout début), BK à l'examen directe rarissime, culture + dans 30% des cas
    • Biopsie à l'aveugle +++

3.3.2.3. Autres

  1. Embolie pulmonaire :
    • 20% des EP s'accompagnent d'EPL
    • Peu abondant, citrin ou séro-hématique, formule aspécifique
    • Peut être transudatif dans 20% des cas
  2. Pleurésies bénignes liées à l'amiante :
    • Diagnostic d'exclusion
    • EPL volontiers à bascule, lymphocytaire non spécifique
    • Suspecté devant exposition à l'amiante, plaques pleurales +/- calcifiées
    • Toujours penser au mésothéliome ⇒ histologie +++ (thoracoscopie)
  3. Post-traumatique
  4. Rupture œsophagienne : à gauche, avec présence quasi constante d'un niveau liquidien
  5. Pathologie sous-diaphragmatique (pancréas +++)
  6. Maladie de système (LED et PR +++)

Résumé basé sur l'item 202 du référentiel du collège des enseignants de pneumologie (Épanchement pleural), mise à jour 2017

cours/residanat/pneumologie/pleuresies_a_liquide_clair.txt · Dernière modification : 2019/04/16 13:35 de admin@medwiki-dz.com

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