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cours:residanat:pneumologie:mycobacterium_tuberculosis_et_autres_mycobacteries

Mycobacterium tuberculosis et autres mycobactéries

1. Introduction

  • On distingue en bactériologie les mycobactéries tuberculeuses (responsables de la tuberculose), des non tuberculeuses (atypiques) responsables d'infections survenant sur des terrains fragilisés (mucoviscidose) ou immunodéprimés (greffe, VIH)
  • La distinction ne peut se faire qu'en laboratoire
  • Le passage de tuberculose latente à maladie dépend de la virulence du germe, mais aussi des certains facteurs génétiques de l'hôte
  • Ce sont des bacilles aérobies ou micro-aérophiles, immobiles, non ramifiés et non sporulés

1.1. Taxonomie

  • Mycobacterium : seul genre de la famille des Mycobacteriaceae de l'ordre des Actinomycétales
  • Défini par 3 critères : Acido-alcoolo-résistance (ne sont pas décolorées après avoir été colorées par la fuschine), présence d'acides mycoliques de structure particulière et le contenu élevé (61-71%) en guanine-cytosine de l'ADN (sauf M. leprae)
  • Divisées selon le pouvoir pathogène :
    • Mycobactéries du complexe tuberculosis à croissance lente
    • Autre, dites atypiques : classées en 4 groupes (classification de Runyon) selon la vitesse de croissance et la pigmentation des cultures

2. Habitat et pouvoir pathogène

2.1. Mycobactéries responsables de la tuberculose

  • Transmission aérienne interhumaine
  • La clinique et l'histologie dépendent de la virulence du bacille et des mécanismes de défense de l'hôte
  • Ces mécanismes résultent d'une coopération cellulaire ⇒ protection de type cellulaire :
    • Premier contact : Réponse immunitaire innée immédiate (Macrophages)
    • Les bacilles se multiplient à l'intérieur des macrophages alvéolaires et dans le ganglion primaire (primo-infection)
    • Réponse cellulaire spécifique adaptative en quelques semaines
      • Si cette dernière est trop longe ⇒ dissémination ⇒
        • Lésions pulmonaires secondaires (nodules, tuberculomes, cavernes)
        • Et extra-pulmonaires (ganglion, os et articulations, reins, péricarde, péritoine, méninges, organes hématopoïétiques…)
    • Multiplication bacillaire dans les lésions ⇒ appel de monocytes circulants, lymphocytes T (cytotoxique et auxiliaire) ⇒ Formation du granulome :
      • Nécrose caséeuse (destruction des macrophages infectés par les LT cytotoxiques)
      • Macrophages en voie de lyse
      • Cellules giganto-épithélioïdes
      • Lymphocytes à la périphérie
    • Le caséeum peut se solidifier et se calcifier (si l'immunité cellulaire est assez efficace) ou bien, on ne sait encore trop dans quelles circonstances, se ramollir et s'évacuer dans les bronches, formant les cavernes

Équilibre physiopathologique lors de la tuberculose

2.2. Mycobactéries atypiques

  • Bactéries présentes dans l'environnement, certaines ont comme réservoir des animaux
  • Pathogènes opportunistes pour la plupart (âge, comorbidités, immunodépression, terrain fragilisé ex. mucoviscidose)
  • Causent principalement des manifestations pulmonaires, cutanées, voir générales

3. Structures pariétales

  • Bactéries Gram positif, mais la paroi ressemble aux Gram négatifs, avec notamment la présence d'une membrane externe
  • La paroi est un facteur majeur de virulence

3.1. Membrane cytoplasmique

Ne diffère pas beaucoup de celles des autres bactéries : bicouche lipidique (lipides polaires, phospholipides) associée à des protéines

3.2. Paroi

  • Composée de 2 feuillets visibles au microscope électronique
  • Une capsule est présente chez les espèces pathogènes
  • Le peptidoglycane confère rigidité et forme aux bacilles
  1. Membrane externe :
    • Structure symétrique en double feuillet, composée principalement d'acide mycolique, et de glycolipides et phospholipides en faible proportion
    • Les gènes codant des enzymes impliqués dans le synthèse des acides mycoliques sont des cibles de l'Isoniazide
    • Contient également des porines insérées dans la couche d'acides mycoliques ⇒ passage des nutriments et antibiotiques hydrophiles (Isoniazide, Ethambutol) ; les composés lipophiles (Rifamycine, Cyclines, Fluoroquinoones, Macrolides) passe directement à travers la membrane
  2. Capsule :
    • Composée principalement de Glycane (arabinomannane) et de physphatidylinositol mannoside
    • Les glycanes sont impliqués dans la régulation de la phagocytose, la modulation de la réponse immunitaire médiée par les cytokines et donc la persistance de l'infection (pouvoir pathogène)

4. Métabolisme

  • Aérobie strict
  • Capacité de dégrader les lipides et phospholipides, pour assimiler les acides gras et synthétiser les nombreux composants lipidiques de la paroi

5. Caractères de Mycobactérium tuberculosis

  • Certains caractères de M. tuberculosis déterminent la conduite et les résultats de la chimiothérapie : rapport avec l'O2, lenteur de multiplication, présence de mutants résistants dans toute souche sauvage

5.1. Différentes populations bacillaires

  • La croissance du BK dépend de plusieurs facteurs, les plus importants = aérobiose et pH

5.1.1. Lésions pulmonaires excavées

  • Richement oxygénées, fortement bacillifères (jusqu'à 108-109 bacilles)
  • Multiplication active au niveau des parois des cavernes
  • Population accessible aux antibiotiques
  • Taux de mutants résistants important, risque élevé de sélection

5.1.2. Lésions fermées

  • Foyers caséeux solides ou lésions nodulaires (TEP, enfant)
  • Pauci-bacillaires, multiplication lente ou par intermittence (peu oxygénées)
  • Difficilement atteinte par les antibiotiques
  • Risque de sélection moindre

5.1.3. Populations intracellulaires

  • Existent dans les 2 types de lésions
  • Bacilles vivant dans le cytoplasme des macrophage
  • pH acide ⇒ défavorable à une croissance active
  • Visés par l'action stérilisante des drogues

5.1.4. Population de bacilles dormant

  • Inactivité métabolique totale
  • Ils sont intracellulaires
  • Inaccessibles à la chimiothérapie conventionnelle
  • Source de réinfection endogène, surtout chez les immunodéprimés

5.2. Résistance du BK

  • Bacille identique au sauvage, mais capable de croitre en présence d'un antibiotique à une concentration ≥ CMI
  • Probabilité d'apparition de mutants résistants dépend de la richesse de la population bacillaire dans les lésions
  1. Résistance acquise :
    • Chez un malade déjà traité (régulier ou non)
    • Spontanée, héréditaire et stable (caractère génétique)
    • Ces mutants existent dans toute souche sauvage
  2. Résistance primaire (ou initiale) :
    • Contamination d'un sujet sain, jamais traité, par un tuberculeux incorrectement traité
    • Le taux de résistance primaire représente un indice épidémiologique important : reflet de la qualité des protocoles thérapeutiques et de leur application
  3. Résistance naturelle : résistance d'une souche sauvage à un antituberculeux = rare
  4. Résistance croisée : relativement peu fréquente

5.3. Lenteur de multiplication

  • Dans les meilleurs conditions, M. tuberculosis se divise toutes les 20h ⇒
    • Une seule prise quotidienne ou intermittente suffit
    • Durée de traitement longue afin de stériliser la totalité des lésions

6. Diagnostic bactériologique de la Tuberculose

  • Mise en évidence (microscopie ou culture) = critère essentiel du diagnostic de certitude
  • L'examen direct se base sur l'acido-alcoolo-résistance des bacilles (ne sont pas décolorés par les acides et l'alcool après avoir été colorés par la fuschine) (base de la coloration de Ziehl Neelsen)

6.1. Prélèvements

6.1.1. Expectoration

  • Le plus fréquent
  • Au moins 2 prélèvements, dont un au réveil à jeun : spot specimen (à la consultation, sous supervision), overnight/collection specimen (au réveil, à apporter le plus vite possible au laboratoire) ; un 3e prélèvement (spot specimen) peut être fait si les 2 sont jugés insuffisants
  • A prélever à l'extérieur du labo ou de la consultation, pièce isolée, devant une fenêtre ouverte et loins de toute autre personne (éviter les gouttelettes infectantes)

6.1.2. Tubage gastrique

  • Chez les enfants et les malades n'arrivant pas à expectorer
  • Nécessite une courte hospitalisation
  • Recueil des sécrétions bronchiques dégluties durant la nuit, par tubage gastrique, avant le levé, malade à jeun
  • Au moins 5 à 10ml de liquide, si pas assez, injecter 10ml de sérum physiologique
  • Généralement, on fait une série de 3 tubages, 3 jours successifs

6.1.3. Conservation et transport

  • À température ambiante, le transport ne doit pas dépasser 3h
  • Les prélèvements se conservent durant 5 jours maximum à 4°C ou en ajoutant un volume égal de bromure de cétyl-pyridinium 1% (éviter la multiplication des germes contaminant qui risquent de nuire à la vitalité des bacilles)
  • Les crachoirs doivent être opaques, hermétiques, étiquetés sur le crachoir (jamais sur le couvercle)

6.2. Technique de l'examen au microscope

  • La plus simple, la plus rapide et la moins coûteuse en région d'endémie
  • Relativement peu sensible (il faut 10.000 BK pour que la probabilité d'en voir au moins 1 soit de 95%) ⇒ multiplier les échantillons

6.2.1. Confection du frottis (coloration de Ziehl-Neelsen)

  • Sur une lame neuve à usage unique, bien dégraissée (baignant dans de l'alcool 70° et acide sulfurique 3%), rincée et essuyée
  • On prélève avec une anse de platine rigide, flambée et refroidie, une parcelle purulente de l'échantillon (du choix de cette parcelle dépend grandement le résultat) ; les crachats hémoptoïques peuvent être utilisés, mais pas le sang
  • Qu'on étale en couche mince au centre de la lame sur une surface rectangulaire de 2x1cm ; immédiatement : flamber et laisser sécher
  • Coloration à la fuschine phéniqueée de Ziehl filtrée
  • Décoloration à l'acide sulfurique dilué au 1/4, puis à l'alcool 90°
  • Recoloration au bleu de méthylène filtré

Prélèvements autre que les expectorations :

  • Tubage, aspiration bronchique, urines : centrifugation à 3000 rpm pendant 20 mn, puis étaler le sédiment (même technique de coloration)
  • Prélèvements pauci-bacillaires (LCR, ponction, pus, broyat de biopsie) : diagnostic microscopique aléatoire ⇒ culture fortement recommandée

6.2.2. Examen microscopique

  • Avec un objectif à immersion X100 et des oculaires moyennes X6 ou X8
  • Examen systématique, la surface du frottis correspond à environ 300 champs microscopiques
  • BK : fins bâtonnets rouges, légèrement incurvés, isolés ou rassemblés par paires ou en amas, plus ou moins granuleux
  • L'appréciation quantitative permet de suivre l'évolution des malades en cours de traitement
Négatifs 0 BAAR/300 champs 0
Douteux 1-9 BAAR/300 champs à refaire
Faiblement + 10-99 BAAR/100 champs (1x)
Moyennement + 1-10 BAAR/champ (moyenne sur 10 champs) (2x)
Fortement + > 10 BAAR/champ (moyenne sur 10 champs) (3x)

6.3. Culture

La culture a une grande importance dans la rigueur du diagnostic bactériologique et le contrôle du traitement de la tuberculose :

  • Permet de confirmer la nature des BAAR vus au microscope (M. tuberculosis)
  • Permet les tests de sensibilité aux antituberculeux
  • Permet le diagnostic des malades fortement suspects donc la microscopie reste négative de façon répétée
  • Permet de surveiller l'efficacité du traitement, à la fin de phase initiale, et à la fin du traitement
  • Indispensable pour le diagnostic de la plupart des tuberculoses extra-pulmonaires
  1. Décontamination des échantillons :
    • Méthode Petroff à la soude, avec ou sans neutralisation
  2. Mise en culture :
    • Ensemencement sur milieux de Löwenstein-Jensen, ou son variant enrichi de pyruvate (pour les M. atypiques, comme M. bovis)
    • Mettre les tubes à l'étuve, à 37°C, horizontalement
    • Ne pas fermer hermétiquement au début (évaporation de la partie liquide de l'inoculum)
    • Après 2-3 jours et à la fin de la première semaine : examen précoce des tubes pour :
      • Fermet hermétiquement
      • Dépister les contaminations (modification de teinte)
      • Voir s'il y a pousse de mycobactéries atypiques à croissance rapide
    • Après, lectures une fois par semaine : on recherche les colonies crèmes, beiges et rugueuses de 2 à 3 mm de diamètre (M. tuberculosis) ; (M. bovis : petites, lisses et brillantes)
    • Première réponse à 28 jours, puis à 42 jours (bacilles à multiplication plus lente), puis à 70 jours (si toujours négatif ⇒ tubes jetés)
Résultat Enregistrement
Pas de colonie Négative
1-19 colonies Nombre de colonies
20-100 (1x)
100-200 (2x)
Confluentes (3x)
Contaminée Contaminée, à refaire

Résumé basé sur le cours de Dr Benazzouz (DEMS 2017), le Guide Algérien de la Lutte Antituberculeuse (édition 2011) et sur Martin C, Maugein J. Bactériologie des mycobactéries responsables d’infections respiratoires. EMC Pneumologie 2012;9(2):1-15 [Article 6-019-A-30].

cours/residanat/pneumologie/mycobacterium_tuberculosis_et_autres_mycobacteries.txt · Dernière modification : 2019/04/16 13:35 de admin@medwiki-dz.com

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