cours:residanat:pneumologie:manifestations_respiratoires_de_la_recto-colite_hemorragique_et_de_la_maladie_de_crohn
Table des matières
Manifestations respiratoires des MICI (Recto-colite Hémorragique, Maladie de Crohn)
1. Introduction
- Intérêt clinique (savoir reconnaitre les manifestations respiratoires et les traiter) et physiopathologique (système immunitaire muqueux commun, origine embryologique partiellement commune)
1.1. Épidémiologie
- Anomalies symptomatiques respiratoires dans les MICI assez rares (0,2% des patients), mais semble sous-estimé ; incidence différente selon les pathologies
- Colectomie et proctolectomie = FDR de développement de manifestations respiratoires associées à la RCUH
- Pas de lient entre tabac et incidence des manifestations respiratoires
2. Atteintes respiratoires au cours des MICI
Atteinte respiratoire | RCUH | Crohn |
---|---|---|
Atteinte (sous-)glottique | + | + |
Atteinte trachéobronchique | +++ Bronchite chronique Bronchite suppurative | ++ Bronchite granulomateuse |
Atteinte bronchiolaire | ++ DDB | + DDB Bronchiolite oblitérante Bronchiolite cellulaire |
Atteinte infiltrante diffuse | + POC | +++ Pneumopathie infiltrative diffuse granulomateuse Pneumonie à éosinophiles |
Nodules pulmonaires (excavés) | ++ | + |
Embolie pulmonaire | + | ++ |
Atteinte des séreuses | ++ Pleurésie neutropénique | + Pleurésie neutropénique |
+: peu décrit ; ++: assez classique ; +++: manifestation la plus fréquente
2.1. Rectocolite ulcérohémorragique
2.1.1. Atteintes trachéobronchiques
- Lésions sténostante de la trachée : avec infiltrat inflammatoire hémorragique (classiquement)
- Pas modifiées par la colectomie ou les périodes d'accalmie de la maladie
- Cliniquement : toux et dysphonie
- Peut répondre aux CTC locaux (nébulisations), nécessite parfois chirurgie au laser ou dilatation à la bougie
- Bronchopathies :
- Ulcérations muqueuses et infiltrat cellulaire chronique lymphoplasmocytaire et PNN (similaire aux lésions histologiques digestives)
- Cliniquement : bronchite chronique parfois suppurative, quelques épisodes hémoptoïques
- Trouble ventilatoire obstructif non réversible fréquent, réactivité à la métacholine normale
- Peut se compliqué de DDB (si non traitées)
- Répond aux corticoïdes inhalés à forte doses, voir systémique ; mais pas aux immunosuppresseurs actifs sur les lésions intestinales
2.1.2. Pneumopathies infiltrantes diffuses
- BOOP : plus classique
- Difficile de différencier une atteinte due à la maladie d'une atteinte iatrogène (Sulfasalazine, Mesalazine)
- Atteinte prédomine aux lobes supérieurs
- Peut évoluer jusqu'à l'insuffisance respiratoire
- Répond bien à la corticothérapie
- Autres : PINS, Pneumonie à éosinophiles (même difficulté)
2.1.3. Nodules nécrobiotiques
- Agrégats neutrophiliques sphéroïdes entourés d'un liseré nécrotique, aseptiques
- Peuvent se résoudre rapidement, se condenser ou s'excaver
- Peuvent être récurrents
- Diagnostic différentiel difficile avec le Wegener, d'autant plus qu'on retrouve parfois des c-ANCA (dans la RCUH, les ANCA sont plutôt de type p-ANCA) ⇒ Biopsie pulmonaire
- Bonne réponse aux corticoïdes systémiques, avec risque de rechutes
2.1.4. Atteintes pleuro-péricardiques
- Exsudats neutrophiliques, contemporains de poussées de RCUH (mais pas forcément)
- Clinique variable (douleur, fièvre, dyspnée, jusqu'à la tamponnade)
- Réponse variable aux traitements (AINS, CTC)
2.1.5. Maladie thrombo-embolique
- Favorisées par les anticorps anti-cardiolipine, malgré un traitement anticoagulant
2.2. Maladie de Crohn
2.2.1. Atteintes glottiques et péri-glottiques
- Rares
- Toux, dysphonie et dyspnée si réduction de calibre
- Œdème et ulcérations du pharynx et du larynx
- Bonne réponse au corticoïdes
2.2.2. Atteintes trachéobronchiques
- Bronchopathie et lésions sténosantes : idem RCUH, mais plus rarement rencontré
- Bronchite chronique parfois suppurative, sténoses trachéobronchiques
- TVO non réversible
- Toux et hémoptysies
- Bronchite granulomateuse :
- Granulomes tuberculoïdes sans nécrose caséeuse
- Granulations blanchâtres à l'endoscopie, métaplasies épithéliales fréquentes
- Radio et TDM généralement normales (sauf épaississement des parois bronchiques)
- Peut évoluer vers des lésions nodulaires sténosantes
- Peuvent régresser sous CSI
- DDB :
- Clinique classique
- LBA : hyperneutrophilique
- Symptômes améliorés par les CSI, et non par les CTC systémiques
- Bronchiolites chroniques (et moins fréquemment aiguës) :
- Dyspnée et toux productive
- Pas favorisée par le tabac
- TVO, sans altération de la DLCO
- TDM HR : atteinte bronchiolaire (oblitérante (aspect en mosaïque, trapping) ou à infiltrats cellulaires (arbre en bourgeons))
- Lymphocytose avec CD4/CD8 légèrement augmenté
- Granulomes tuberculeux non nécrosants à la biopsie pulmonaire
- Bonne réponse aux corticoïdes
2.2.3. Pneumopathies infiltrantes diffuses
- Clinique très variable
- Nécessite souvent une biopsie pulmonaire chirurgicale (manque de corrélation radio histologiques)
- Pneumopathie infiltrante granulomateuse : forme classique
- Infiltrat granulomateux péri-bronchiolo-vasculaire et dans les septa alvéolaires
- Atteinte généralement sévère : dyspnée, toux productive, signes généraux
- Imagerie : condensations nodulaires ou en masses, zones de piégeage
- LBA : lymphocytaire
- Syndrome restrictif avec altération de la DLCO
- Peut se résoudre spontanément ou sous corticoïdes
- Pneumopathies à éosinophiles :
- Bronchiolite oblitérante (BOOP) :
- Ces 2 dernières peuvent aussi être iatrogènes (Sulfasalazine, Mesalazine)
- Formes nodulaires : même chose, mais moins fréquente que dans la RCUH
- Fibrose interstitielle : non spécifique et rare
2.2.4. Atteinte pleurale
- Épaississements ou épanchements exsudatifs neutrophiliques
- Peuvent être associées à une péricardite
2.2.5. Fistules
- Trois types : colo-bronchiques, oesophago-bronchiques et iléo-bronchiques (moins fréquente)
- Tableau de pneumonie chronique avec toux et expectorations fécaloïdes (possibilité de mise en évidence de bactéries intestinales)
- Transit ou lavement avec produit de contraste = confirmation
2.2.6. Maladie de Wegener
- A été rapportée associée à la maladie de Crohn
- Mais, le Crohn lui même peut mimer un Wegener pulmonaire (même cas que RCUH, présence d'ANCA)
- Parfois, seul l'histologie permet de trancher
2.2.7. Amyloïdose
- Complication rare
- Nodules formés par l'amyloïde A
2.2.8. Sarcoïdose
- Sarcoïdose et Crohn = granulomatoses systémiques parfois difficiles à distinguer
- Atteinte digestive exceptionnelle dans la sarcoïdose
- Crohn peut donner des manifestations typiquement sarcoïdosiques
- CD4/CD8 augmenté dans les 2 maladies
- L'enzyme de conversion est plutôt diminuée dans le Crohn
- Autres éléments de distinction : IDR, BGSA, scintigraphie pulmonaire au gallium 67
- Les 2 peuvent co-exister
2.2.9. Maladie thromboembolique
- Crohn = FDR (mécanisme non clair)
3. Atteintes pulmonaires iatrogènes
- Principaux traitements : Sulfasalazine, Mesalazine, Corticoïdes, Immunosuppresseurs (azathioprine, 6-ùercaptopurine, ciclosporine, méthotrexate) et anti-TNFα (Infliximab)
- Tous ces traitements sont potentiellement pourvoyeurs de lésions pulmonaires
- L'arrêt du traitement suffisamment tôt conduit généralement à la résolution
3.1. Sulfalazine et Mesalazine
- Pneumonies à éosinophiles +++, avec parfois hyper-éosinophilie sanguine
- Alvéolites lymphocytaires
- BOOP
- Pneumopathie granulomateuse
- Toutes régressent à l'arrêt du traitement, et peuvent réapparaître à sa reprise
3.2. Méthotrexate
- Pneumopathie interstitielle sévère et potentiellement fatale
3.3. Azathioprine et 6-mercaptopurine
- Pneumopathies interstitielles (principalement chez les transplantés, mais aussi chez les MICI)
3.4. Infliximab
- Un cas de SDRA, et un cas d'hémorragie alvéolaire diffuse, en général à la 2e injection
3.5. Infections opportunistes
- La localisation la plus fréquente est l'appareil respiratoire
- Corticoïdes ⇒ infections mycotiques +++
- Azathioprine et 6-mercaptopurine ⇒ infections virales (CMV, Herpès zoster)
- Infliximab ⇒ tuberculose (réveil), aspergillose invasive
- Ciclosporine ⇒ pneumocystose (un cas rapporté, fatal)
4. Anomalies fonctionnelles respiratoires et inflammatoires
- Anomalies latentes fréquentes (plus que les manifestations cliniques qui sont relativement rares)
- Altération de la DLCO +++ (50% des patients), surtout en période d'activité de la maladie
- Hyper-réactivité bronchique indépendante du statut atopique, en corrélation avec l'hyper-lymphocytose de l'expectoration induite (plutôt qu'avec une hyper-éosinophilie)
- Accroissement de la perméabilité bronchique
- LBA : PNN non altérés dans la RCUH, lymphocytes CD4 dans le Crohn
- FeNO (reflet de l'inflammation des VA) augmenté, corrélé à l'activité de la maladie
5. Conclusion
- Manifestations rares, mais témoignent d'une origine embryonnaire commune (système muqueux commun)
- Peuvent être latentes
- Peuvent devenir agressives
- La plupart sont indépendantes des traitements, même si une atteinte iatrogène est toujours possible
— Résumé basé sur Guiot J., Louis E., Belaiche J., Louis R. Manifestations respiratoires de la rectocolite ulcérohémorragique et de la maladie de Crohn. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris), Pneumologie, 6-062-D-10, 2008.
cours/residanat/pneumologie/manifestations_respiratoires_de_la_recto-colite_hemorragique_et_de_la_maladie_de_crohn.txt · Dernière modification : 2019/04/16 13:35 de admin@medwiki-dz.com