Table des matières
Tuberculose à bacilles multi-résistants
Objectifs pédagogiques : (WTF!)
- Apparait suite à de multiples traitements anarchiques
- Insister sur l'antibiogramme
- Effets secondaires à prendre en charge
- DOTS
- Intérêt du genXpert
- Mesures préventives pour l'entourage du malade
- Traitement très long : observance thérapeutique à maintenir
- Faire attention à la contamination bovine qui ne répond pas au traitement usuel
- Diagnostic de la tuberculose … et son traitement
1. Introduction
- Tuberculose = maladie contagieuse transmise par un malade bacillifère (TPM+)
- Morbidité aggravée par : promiscuité, pauvreté, marginalisation sociale, infection par le VIH
- Source de bacilles résistants = malades déjà traités
- Priorité des programme de lutte = Prévention des résistance (et non leur prise en charge individuelle)
2. Définitions
- Résistance bactérienne : capacité d'un micro-organisme à survivre et à ce multiplier en présence d'un CMI (concentration minimale inhibitrice) d'un médicament donné (monorésistance) ET de transmettre ce caractère à ses descendants
- Multi-résistance (MDR) : résistance du BK aux 2 anti-BK majeurs (R et H) au moins
- Ultra-résistance (XDR) : MDR + fluoroquinolones et aminosides de réserve (kanamycine, amikacine, capréomycine (CAK))
- Résistance acquise : présence de BK résistants (une ou plusieurs drogues) chez un malade déjà traité de façon régulière ou non
- Résistance primaire : idem, chez un nouveau cas (jamais traité, ou pendant moins d'un mois)
3. Physiopathologie
3.1. Mutation chromosomique
- La résistance de M. tuberculosis est une mutation chromosomique : phénomène rare, spontané, spécifique, héréditaire et stable
- Pas de différence de virulence entre BK sauvage et résistant
3.2. Principales causes de résistance
- Mono thérapie
- Addition successive de médicaments
- Régimes inefficaces ou inadaptés au cas
- Antibiotiques de mauvaise qualité
- Traitement irrégulier avec interruptions et reprises non contrôlées
3.3. Phénomène de Fall and Rise
- Mono thérapie ⇒ après 2 semaines à plusieurs mois, sélection de mutants résistants (chute des BK sensibles, monté des BK résistants)
4. Épidémiologie
4.1. Dans le monde
- Problème ubiquitaire mondiale
- Nouveau cas : 10,2% mono-résistants (0% à Andorre, Islande et Malte - 57,1% au Kazakhstan), 1% MDR ; résistance la plus fréquente : Isoniazide (5,9%) et Streptomycine (6,3%)
- Cas déjà traités : 18,6% mono-rsistants, 6,9% MDR
- Estimation OMS 2015 : Incidence annuelle de 480.000 MDR + 100.000 mono-résistants à la rifampicine ; parmi eux, les XDR sont estimés à 9,5%
- 48% de ces 580.000 cas sont concentré en Inde, Chine et Russie (disparités régionales importantes)
4.2. En Algérie
- 2014 : 3,6% de résistance, 1,4% de MDR
- Les taux de résistances acquise et primaire ont parallèlement baissé de 1965 à 1995
- Puis, les taux de résistance acquises et de MDR ont eu tendance à augmenté (mais c'est probablement lié à une sélection des malades pour lesquels un antibiogramme est demandé)
- Les rares cas de MDR primaires ont été identifié dans l'entourage immédiat de porteurs chroniques de souches MDR
Note : quand le taux de MDR primaire devient ≥ 4% de tous les cas de tuberculose ⇒ le programme de lutte local peut devenir inadapté
5. Diagnostic positif
5.1. Suspecter une tuberculose résistante
Clinique semblable à une TBK sensible, mais certaines situations cliniques doivent faire suspecter une souche résistante :
- Origine géographique : pays à forte prévalence de BK résistants
- Sujet contaminant atteint de TBK résistante
- Traitement antérieur anarchique : anamnèse exhaustive (durées et doses des médicaments pris)
- Pas d'amélioration sous traitement, ou récidive clinique
- Présence de facteur d'échec thérapeutique :
- Mauvaise observance : coloration des urines (rifampicine), errance sociale, troubles psychiatriques, alcoolisme, toxicomanie, effets secondaires ⇒ surveillance d'une tierce personne +++
- Mal-absorption : rifampicine et isoniazide doivent être pris à jeun +++ ; rechercher cause de mal-absorption (SIDA, diarrhée chronique, tuberculose digestive…) ; dosage des médicaments au doute
- Troubles de la diffusion : rechutes sur séquelles pleurales très épaisses ⇒ trouble de diffusion ⇒ un seul traitement peut arriver (mono-thérapie) ⇒ sélection
5.2. Diagnostic de certitude
5.2.1. Cultures
5.2.1.1. Sur milieu solide
- Milieu de Lowenstein-Jensen = méthode de référence
- Résultats fiables pour les traitements de première ligne (sauf Pyrazinamide : pH inadapté) ; deuxième lignes ⇒ laboratoire spécialisé
- Défaut : temps nécessaire pour obtenir des cultures de bonne qualité
- Possibilité de faire un antibiogramme directe sur un prélèvement riche en BK à l'examen directe (au moins 1 BAAR par champs)
5.2.1.2. Sur milieu liquide
- Méthodes développées pour réduire le temps d'obtention des antibiogrammes
- Détection de la production de CO2 : BACTEC 460, MB/Bact
- Détection de la consommation d'O2 : MGIT (mycobacteria growth indicator tube)
- Résultats en 8 à 10 jours
- Comparable aux méthodes de référence dans 97-98% des cas, pour rifampicine et isoniazide ; moins fiables pour éthambutol et streptomycine ; résultats variables pour pyrazinamide et drogues de 2e ligne
- Défaut : coût, complexité et technicité
5.2.1.3. Autres techniques
- MODS (microscopic observation drug susceptibility) : bons résultats, en 7 jours en moyenne, mais difficulté de différencier M. tuberculosis d'autres mycobactéries à croissance rapide
- Colorimétrie sur milieu liquide : directement sur échantillons d'expectoration positifs, bon résultats pour la rifampicine et l'isoniazide, mais en 14 jours
- TLA (thin-layer agar) : culture sur agar, méthode simple, même sensibilité que les méthodes traditionnelles, 11 jours
- Techniques utilisant des mycobactériophages…
- Le développement de méthodes rapides, fiables et peu couteuses d'identification est essentiel pour le contrôle de la tuberculose, notamment dans les pays aux ressources limitées
5.2.2. Diagnostic moléculaire
- Basé sur l'amplification génique de régions clé des gènes associés aux principales résistances
- Diagnostic rapide et assez fiable en 24-72h
- Rifampicine : étude d'un fragment du gène rpoB
- Technique LIPA (line probe assay) : laboratoires spécialisés
- Techniques d'hybridation sur bandelettes : plus simples à mettre en oeuvre
- Deux marques disponibles : INNO-LIPA RifTB et Genotype MTBDR
- Sensibilité 90-97%, spécificité ≈ 100%
- Isoniazide : nombreux gènes (inhA, katG, kasA) ⇒ plus complexe
- Résistance de bas niveau : résistance pour concentration d'INH ≤ 0,5 mg/l (reste actif in vitro à 1 mg/l)
- inhA souvent en cause (résistance croisée à l'éthionamide)
- Résistance de haut niveau : résistance même à forte concentration (1 mg/l)
- katG souvent en cause
- Détectées par MTBDR (inhA et katG), sensibilité 70-90%, spécificité ≈ 100%
- Ethambutol, Pyrazinamide et Fluoroquinolones : pas de méthodes simple (bandelettes) ⇒ séquençage
6. Conséquences de la résistance
- Sur le plan individuel : persistance de la maladie, complications, perte de confiance, risque accru d'abandon du traitement, retentissement socio-économique
- Sur le plan collectif : risque de contamination et de dissémination des souches résistantes
- Sur le plan financier : cout directes (traitements, hospitalisations), et indirects (arrêts de travail de longue durée, perte de productivité)
7. Prise en charge
Voir le cours Tuberculose : Les catégories de malades et les régimes thérapeutiques, titres Les régimes de troisième ligne et Cas chroniques et à bacilles multi-résistants
8. Prévention
Application rigoureuse des règles impératifs du traitement anti-tuberculeux, à savoir :
- Association (fix de préférence), éviter toute monothérapie
- Régime adapté
- Dose suffisante
- À jeun
- Régularité et supervision : rechercher les facteurs de risque d'abandon, relancer régulièrement la motivation du patient, soutien psychologique
9. Conclusion
Défis actuels en Algérie :
- Insuffisance de structures de santé accessibles, efficaces et contrôlées
- Accessibilité limités aux techniques rapides de diagnostic de la résistance
- Fréquence encore élevée des interruptions de traitement
- Manque de nouvelles molécules efficaces pour le traitement des TBK MDR et XDR
— Résumé basé sur le cours de Dr. R. S. Benazzouz (DEMS 2016), sur le Guide Algérien de la Lutte Antituberculeuse - édition 2011, ansi que sur Fréchet-Jachym M., Métivier N. Tuberculose résistante. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris), Pneumologie, 6-019-A-35, 2009.