cours:residanat:pneumologie:asthmes_particuliers
Table des matières
Asthmes particuliers
1. Introduction
1.1. Définition de l'asthme
Définition de l'asthme selon le dernier GINA (2018)
1.2. Définition des asthmes particuliers
- Situations spéciales nécessitant un ajustement particulier de la PEC pour permettre le contrôle
- Asthmes vrais, survenant dans une situation particulière ou qui entrent dans le cadre d'une affection respiratoire ou d'une maladie générale
2. Asthmes particuliers
2.1. Asthme d'effort
2.1.1. Définition
- Obstruction bronchique à l'arrêt de l'effort ; parfois pendant l'effort, mais il est possible de “courir à travers son asthme” si l'effort est poursuivi
- 10 à 20% de prévalence, associé à l'asthme dans 70 à 87% des cas, à une rhinite dans 40% ; presque toujours chez un enfant ou un adolescent
- Ne pas confondre à la dyspnée d'effort inter-critique
- 2 entités :
- Asthme induit par l'exercice (AIE)
- Bronchospasme induit par l'exercice (BIE)
2.1.2. Physiopathologie
2 hypothèses :
- Hypothèse thermique (asthme thermo-induit) : changement de T° ⇒ bronchospasme et œdème
- Hypothèse osmotique : changement d'osmolarité au niveau des voies aériennes
2.1.3. Diagnostic
- Les symptômes débutent 5 à 10 minutes après l'effort
- Signes typiques : toux, sifflement, dyspnée, oppression thoracique
- Signes atypiques : crampes abdominales, épigastralgies, douleurs thoraciques, céphalées, fatigabilité
- Résolution spontanée ou sous traitement
- Période réfractaire dans 50% des cas (30 mn à 4 heures)
- Bronchospasme tardif 12 à 16h après, régresse en 24h
2.1.4. Prise en charge
2.1.4.1. Prévention
- Éviter l'exercice en cas de symptômes d'asthme
- Mesurer le DEP avant et après
- Tenir compte des conditions climatiques et du pollen
- Porter une écharpe ou un masque (limiter le bronchospasme)
- Échauffement progressif et fractionné
- Effort continu au moin 15 mn, intensité modérée
- Respirer par le nez
- Arrêt progressif de l'effort
2.1.4.2. Traitement
- Bon ajustement du traitement de l'asthme
- Dans le BIE, traitement préventif exclusif :
- Béta-2 mimétiques et anti-leucotriènes ⇒ efficaces
- Anti-cholinergiques, anti-histaminiques, théophylline ⇒ inefficaces
- Si pas de réponse : soit asthme chronique, soit autre cause (cardiopathie, dyskinésie des cordes vocales…)
- Modalités :
- SABA (Salbutamol, Terbutaline) : 1 à 2 bff, 15 à 30 mn avant l'effort, protection de 4h
- LABA (Salmétérol, Formotérol) : 1 à 2 bff ou gel, 30 à 60 mn avant l'effort, protection de 12h
- Anti-leucotriènes (Montélukast, Zafirlukast, Zileutron) : 1 cp, 1 à 2h avant l'effort
2.2. Asthme et RGO
2.2.1. Généralités
- Lien prouvé :
- Hernie hiatale (+/- RGO) = 3e comorbidité de l'asthme (5,8 x) après HTA et diabète
- Plus grande fréquence d'asthme chez les RGO (2,2 x chez l'adulte, 1,9 x chez l'enfant)
- Relation entre RGO et sévérité de l'asthme non établie, relation entre épisodes de RGO et exacerbations d'asthme prouvé
2.2.2. Physiopathologie
2.2.2.1. RGO => Asthme
- Aggravation de l'HRB lors de perfusions d'acide (données expérimentales) ; 3 mécanismes incriminés :
- Micro-inhalation de liquide ⇒ inflammation bronchique / bronchoconstriction (stimulation de récepteurs vagaux)
- Récepteurs d'acidité du bas œsophage ⇒ stimulation vagale ⇒ bronchoconstriction
- Inflammation neurogénique bronchique
2.2.2.2. Asthme => RGO
- Béta-2 mimétiques et CSI ⇒ action sur la relaxation du bas œsophage
- Asthme (vieilli +++) ⇒ modifications mécaniques diaphragmatique ⇒ favorise RGO
2.2.3. Prise en charge
- Asthmatique + symptômes de RGO : traitement du RGO ; pas la peine d'explorer (sauf > 50 ans et AEG)
- Asthme stable : ne pas rechercher de RGO
- Asthme instable malgré traitement bien conduit, ou nécessite hautes doses de CSI/CSO : rechercher systématiquement (entre-autres) un RGO ; test thérapeutique en cas de doute (IPP double dose 8 semaines)
- Indication de la chirurgie : aggravation de l'asthme dès l'arrêt du traitement du RGO, ou si le lien RGO-crise est confirmé par pH-métrie
2.3. Asthme médicamenteux
- 4 à 28% des adultes asthmatiques, rarement chez l'enfant
- Atopie et asthme ne prédisposent pas à des réactions allergiques médicamenteuses, mais elles sont plus violentes dans ces cas.
- Médicaments les plus fréquemment incriminés :
- Aspirine (plus connue, syndrome de Widal)
- AINS
- Béta-bloquants
- IEC
- Sulfites
2.3.1. Asthme induit par l'aspirine
2.3.1.1. Physiopathologie
- Pas entièrement élucidée
- Déviation de la voie de dégradation de l'acide arachidonique vers la voie de la lipo-oxygénase et leucotriène, au dépens de la voie de la cyclo-oxygénase, ce qui induit une inflammation et entretient la synthèse de prostanoïdes inflammatoires
- Inflammation persistante avec éosinophilie marquée +++ (plus que chez l'asthmatique sans intolérance à l'aspirine)
- Il s'agit d'une pseudoallergie, car non IgE-médiée. Réponse biochimique anormale à l'action pharmacologique des AINS (inhibiteurs de la COX-1)
2.3.1.2. Diagnostic
- Rhinite persistante, puis obstruction nasale avec anosmie développée en quelques mois, puis asthme (1 à 5 ans après)
- Plus précoce, plus progressif et plus sévère chez les femmes
- Prise d'aspirine ⇒ crise d'emblée sévère dans les 3 heures ; associée à rhinorrhée profuse, injection conjonctivale, flush, œdème péri-orbitaire, douleurs abdominales et urticaire modéré
- Diagnostic évoqué devant :
- ATCD de crise dyspnéique lors de la prise d'aspirine (ou AINS)
- Obstruction nasale chronique avec rhinorrhée aqueuse, résistant au traitement, surtout si tests cutanés négatifs
- Polypose nasale + pan-sinusite à la TDM
- Crise d'asthme sévère sans cause apparente
- Diagnostic de certitude difficile : pas de test in vitro, test de provocation orale dangereux ; test par inhalation de lysine aspirine :
- Quand le patient est au mieux (VEMS > 70%)
- Positif si :
- Signes clinique (obstruction bronchique + irritation oculo-nasale) + baisse de 15% du VEMS
- Ou baisse de 20% du VEMS (sans signes cliniques)
2.3.1.3. Prise en charge
- Contre-indication formelle et définitive de l'aspirine et des AINS ainsi que de tout inhibiteur de la COX-1
- Remplacer par le dextropropoxyphène ou la paracétamol à demi-dose au début (faible inhibiteur de la COX 1 et 2 ⇒ bronchospasme chez 34% des asthmes à l'aspirine)
- Éviter aussi :
- HHC
- Colorants (E102, 110, 111, 127, 211) et Conservateurs (E210, 217, 230, 280, 282)
- Traitements :
- Anti-leucotriènes (antagonistes du cysteinil-leucotriène 1 (montelukast, zafirlukast), inhibiteurs de la lipo-oxygénase (zileutron))
- Corticoïdes à la place des AINS
- Anti-histaminiques et décongestionnant inefficaces
- Polypectomie déconseillée ; sauf certains cas (avec prudence en pré- et post-chirurgical à cause des traitements utilisés (béta-bloquants, antalgiques))
- Désensibilisation en milieux hospitalier spécialisé ; recommandée quand :
- Besoin fréquent de dose importantes de CTC
- Polypectomie ou chirurgie sinusienne répétée
- Besoin d'aspirine ou d'autres AINS pour d'autres maladies (rhumatologique, cardiaque…)
2.4. Asthme durant la grossesse
- L'asthme peut influer sur la grossesse, tout comme la grossesse peut influer sur l'asthme
2.4.1. Effets de l'asthme sur la grossesse
Les femmes asthmatiques ont un risque accru de grossesse à problème ; les facteurs à problème sont :
- Hypoxie : peut entrainer ⇒ faible poids de naissance, malformations, pré-éclampsie, ABRT spontanés, placenta praevia (même en cas de légère baisse de la SpO2, notamment lors de crises sévères)
- Inflammation : effet des médiateurs (CSI = effet protecteur)
- Tabac : contribue à donner un faible poids de naissance (rôle exacte reste à déterminer)
- Certains médicaments : les CSO seraient responsables de prématurité ; les CSI n'ont aucun effet négatif sur le développement foetal, au contraire (du fait qu'ils aident à contrôler l'asthme)
- Altération des fonctions placentaires : altération du débit sanguin placentaire et de l'activité de l'enzyme 11-béta hydroxystéroïde déshydrogénase type 2 qui protège le fœtus de l'excès de glucocorticoïdes maternels ; notamment chez la femme asthmatique, enceinte d'une fille et qui ne prennent pas de CSI
2.4.2. Effets de la grossesse sur l'asthme
- Effet imprévisible, dépend de la sévérité de l'asthme en général (intermittent et modérés se stabilisent ou s'améliorent, sévère s'aggravent) ; classiquement, on dit que 1/3 s'améliorent, 1/3 se stabilisent, 1/3 s'aggravent
- Critères de détérioration et d'amélioration selon Schatz et al. :
- Détérioration = augmentation du nombre de jours de sibilance, influant sur le sommeil et l'activité entre 25 et 32 SA
- Amélioration = diminution des sifflements, amélioration du sommeil entre 25 et 32 SA
- Dans tous les cas, on note une amélioration entre 37 et 40 SA
- La plupart du temps : dégradation durant la grossesse ⇒ amélioration en postpartum, et inversement
- Lors de 2 grossesses consécutives : 60% d'évolution similaire, 40% différente (tabac?, sexe du fœtus?
- Mécanismes non totalement compris :
- Hormones :
- Augmentation des hormones : cortisol (anti-inflammatoire), progestérone (ventilation minute, myorelaxant, mais aussi altère la réponse des récepteurs béta-2, agent inflammant les VA)
- Exacerbations chez 40% des femmes asthmatiques lors des règles (oestradiol et progestérones bas)
- Exposition aux antigènes fœtaux, altération des fonctions immunitaires ⇒ pourraient prédisposer à l'aggravation de l'asthme
- Effet du sexe fœtal :
- Il semble que les fœtus femelle entrainent plus souvent de dégradation que les mâles (Beecroftn et al., étude sur 34 femmes enceintes avec asthme modéré à sévère)
2.4.3. Traitement de l'asthme durant la grossesse
- Le contrôle est indispensable car il améliore le pronostic périnatal ; l'utilisation de médicaments même dont l'innocuité n'est pas prouvée est justifiée
2.4.3.1. Prise en charge au long cours
- Traitement normal selon les recommandations
- La prise en charge doit commencer avant la grossesse autant que possible (évaluation, contrôle)
- Suivi et contrôle régulier (chaque mois s'il le faut)
- CSI : aucune preuve d'effet mal-formatif ou de complications fœtales
- CSO : à éviter sauf indication formelle (risque d'hypotrophie fœtale)
- Éviction des allergènes
- Immunothérapie débutée avant la grossesse peut être poursuivie, mais éviter la montée des doses
- Médicaments :
- SABA : efficaces et inoffensifs
- LABA : peu d'études, profile de sécurité similaire aux SABA ⇒ rapport bénéfice/risque en faveur de leur utilisation selon GINA
- Antileucotriènes : rares études humaines, risque de fente palatine chez le lapin avec le Zafirlukast, mais pas de contre-indication formelle
- Théophylline : sure aux doses recommandées (5-12 µg/ml), risque de prématurité en cas de surdosage
- Corticoïdes systémiques : fente labiale et palatine (0,1 à 0,3%) (surtout à T1), prématurité (x 1,5), pré-éclampsie et petit poids de naissance (x 1,8) ⇒ malgré cela, pas de contre-indication dans les asthme sévère avec mise en jeu du pronostic vital de la mère
- Bromure d'ipratropium : pas d'études humaines, pas de contre-indications animales ⇒ si échec des SABA, uniquement en association et en cas de crise sévère
2.4.3.2. Prise en charge de la crise
- Objectif : préserver la vie de la mère, en évitant une souffrance fœtale
- Maintenir SpO2 > 95%, en surveillant le fœtus (monitoring)
- SABA forte doses, corticoïdes systémiques si nécessaire
2.5. Asthme du sujet âgé
2.5.1. Définition
- Idem critères GINA, avec quelques particularités :
- Perte du caractère réversible (asthme vieilli = asthme évoluant depuis de nombreuses années)
- Vieillissement de l'appareil respiratoire (asthme de novo = asthme d'apparition tardive après 50 ans, surtout chez la femme)
- HRB non spécifique quasi physiologique chez le sujet agé
2.5.2. Épidémiologie
- USA : prévalence de l'asthme
- 6 à 10% dans la population générale
- 6,5% chez les plus de 70 ans, non fumeurs, non cardiaques
- DZ : inconnue ; vieillissement de la population ⇒ fréquence surement non négligeable
2.5.3. Physiopathologie
- Réduction de l'importance de la composante allergique (seulement 12% des asthme apparus après 60 ans, contre 71% chez les 30-45 ans)
- Asthme dit “intrinsèque” (apparait souvent après la 40'aine à la suite d'une infection, évolue d'emblée vers dyspnée continue) ; mécanisme controversé ; son existence même est niée par certains auteurs
- Mécanisme auto-immun? allergène méconnu? facteurs hormonaux? mécanisme infectieux?
2.5.4. Diagnostic
- Si distingue par une dyspnée continue souvent négligée et une toux chronique et d'effort le plus souvent productive
- Signes parfois atypiques : troubles du sommeil, dépression, limitation des activités
- Diagnostic différentiel difficile :
- Pseudo-asthme cardiaque
- RGO
- Troubles de la déglutition et micro-inhalation alimentaires
- Atteinte des VAS (sinusite chronique avec rhinorrhée postérieure)
- BPCO (distinction parfois impossible)
2.5.5. Prise en charge
- Objectifs :
- Suppression des symptômes
- Recours minimal aux urgences
- Qualité de vie
- Prévention des effets secondaires pour une bonne observance
- Particularités dues à la mobilité et au revenu réduits
- Éducation et programme d'action thérapeutique simples et écrits, adaptés aux difficultés de compréhension et de mémorisation
- Chambre d'inhalation systématique en cas de pMDI
- Favoriser les CSI, rinçage de la bouche très important
- Prudence avec les LABA chez les sujets cardiaques sévères
- Éviter la théophylline
- Immunothérapie contre-indiquée (inefficace, risque d'anaphylaxie fatale le plus souvent)
2.6. Formes cliniques rares
2.6.1. Aspergillose Broncho-Pulmonaire Allergique (ABPA)
Voir cour Poumon éosinophie, titre Pneumopathies mycotiques (ABPA)
2.6.2. Syndrome de Churg & Strauss
Voir cour Poumon éosinophile, titre Syndrome de Churg & Strauss
2.6.3. Maladie de Carrington
Voir cour Poumon éosinophile, titre Maladie de Carrington
3. Conclusion
- Prise en charge multi-disciplinaire
- Traitement de l'asthme toujours prescrit, selon la sévérité, en prenant compte des spécificités des différents cas de figure
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